Variation sur un horizon
perdu
(Musique)
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Je possède actuellement, grâce à un
ami cinéaste, Jean Paul Lebesson, les seuls enregistrements qu'on puisse posséder
de la voix de Stanislas Rodanski. Ces enregistrements n'ont jamais été
publiés et ont été stockés dans de très mauvaises
conditions. Ils ont une grande valeur historique car ils témoignent du passé
de Stanislas Rodanski : sa jeunesse, les camps d'internement, le mouvement surréaliste,
mais également de son quotidien à l'hôpital. Au total, c'est
une trentaine d'heures de voix qui sont ainsi sur des bandes magnétiques.
L'objet de la pièce musicale sera donc de travailler avec des échantillons
de ce dernier texte lu par Stanislas RODANSKI et d'en perpétuer toute la poésie
:
"Ce texte ultime, s'il n'est plus un écrit est encore une parole qui,
par son ressassement même , dit la catastrophe existentielle que, signe la
perte de tout horizon. Ce n'est pas "du Rodanski pur" mais du Rodanski
dans son rapport à nous. Un métissage, le montage de certains propos
qu'il nous a tenus lors de conversations enregistrées entre 1977 et 1981.
Notre rencontre avait été immédiate : nous caressions l'idée
d'un film (*) sur l'Horizon Perdu et lui se vivait comme l'acteur obligé d'un
obsédant cinéma intérieur : "Que me veulent les Maîtres
du monde ? Quel film... Enfin j'ai fini d'écrire.". J.P. Lebesson.
VARIATION SUR UN NEON
Dans un premier temps, j'ai juste nettoyé les bruits de surface des vieux
enregistrements et en raviver les couleurs (art séculaire) à l'aide
d'outils tels que Peak, audiosculpt.
Puis j'ai réalisé cette pièce musicale d'abord pour faire revivre
la voix oubliée de S.R, pour faire entendre à nouveau ce timbre si
particulier (souffle, rugosité etc...), voix dont Julien Gracq disait n'avoir
jamais entendu d'aussi caverneuse.
Ensuite, pour écrire une nouvelle histoire issues de carnets aux textes effacés
"arrivé à l’hôpital, il se souvient..." qui incitent
à retrouver une chronologie d'un cocktail de mythologie et de série
noire...
C'est une écriture de fusion mêlant la voix parlée de
Stanislas Rodanski, ....à des sons de néons qui ont été
traités par des manipulations sur la vitesse, à l'envers, étirement...tous
les traitements permis en musique concrète. Ces sons de néons enregistrés
dans des hôpitaux, des garages, des églises et lieux divers évoquent
ainsi l'errance de Rodanski (il aurait aimé être reporter) tout en soulignant
sa quête de lumière... il avait d'ailleurs donné le nom
de NEON à un journal, d'un seul numéro, qu'il avait créé
en 1947. Car cette absence de communication dont fut victime Stanislas Rodanski pourrait
être ce tube luminescent qu'on trouve aujourd'hui dans nos nuits sur terre,
dans le désespoir des limites de ces rues désertes, des néons
à la fois harmonieux et bruyants qu'on utilise pour notre éclairage
mais qui ne donnent pas de chaleur.
La musique oscille - entre fiction et reportage, reflet et contestation du réel
: il y a dans la pièce musicale un instant de départ d'un bateau pour
de lointains horizons, Shangri-la, ville mystérieuse où le temps s'arrête,
où on ne vieillit jamais. Les percussions, réalisées avec la
table d'harmonie d'un violon, désignent la virtualité de ce voyage
vécu dans l'enceinte d'une maison d'internement psychiatrique.
la pièce sera ainsi écoutée par l'auditeur dans son propre environnement,
sa propre chambre, il bouge, va et vient , se perd et se retrouve...comme le parcours
de la vie de Stanislas Rodanski.
PAROLES DE S.R "VARIATION
SUR UN HORIZON PERDU"
0 - 12’’
Je suis ce qui ne passe pas, de l’enfance je suis le messager
24’’- 29’’
Nous n’allons pas en Europe, nous allons dans la vallée disparue de Shangri-là
59’’- 1’04’’
On voyait les hommes piocher et les femmes conduises à la mort
1’26’’ - 1’28’’
Arrivé à l’hôpital, il se souvient
1’41’’- 1’56’’
Un homme qui se souvient de sa vie passé, qui découvre des circonstances
surprenantes...Après la mort, il y a l’horreur et tout un matériel
d’horreurs, avec eux, pour faire ça en grand de façon illimitée,
des horreurs illimitées !
3’11’’ - 3’17’’
Dans des expressions de souffrances absolument inconnues de l’humanité...
4’46’’ - 5’02’’
Ce qui constitue un crime absolument insondable et puis la sombre beauté du
spectacle est une gravité sans nom, le goût de la beauté ne peut
aller si loin qu’à un moment...
5’15’’
L’intervention des horreurs, les horreurs suivent naturellement la beauté
!
6’06’’ - 6’08’’
Comment fait on pour écrire un sujet ?
8’
Après la mort (phrase répétée 5 fois)
8’27’’ - 8’31’’
Ils se sont reposés avec Dieu, reposés avec Dieu
8’34’’ - 8’45’’
Pour en arrivé à quelque chose d’insaisissable, il cherchait par là
quelque chose de vraisemblable - Vieille histoire, Vieille histoire, Vieille histoire,
Vieille histoire, Vieille histoire...
8’46’’ - 8’55’’
Ah non non, c’est lui qui avait dit effectivement “ moi, je n’ai marre, je me sens
pas bien du tout, alors faites le, vous me licenciez et tout ! ” c’est lui qu’il
l’avait proposé
10’15’’- 10’20’’
On peut dire ce que c’est d’avoir connu Shangri-là
10’54’’- 10’20’’
Arrivé à l’hôpital, il se souviens, il s’est trompé de
chambre, il vois une jeune fille, il est question d’un tableau : les soleils de Van
Gogh.
16’48’’
Le souvenir, le souvenir, c’est tellement ça, c’est la vie d’un homme à
l’hôpital
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